Voyons, voyons, il nous sera impossible de ne pas blesser les sensibilités avec cette critique, donc si vous avez beaucoup aimé Luna Nera, ne lisez pas les lignes à continuation.
Nous avions déjà informé lors de son apparition sur le catalogue de Netflix que nous lui accorderions le bénéfice du doute car les informations auxquelles nous avions accédé promettaient de grandes réflexions et une revendication féministe. Après 3 épisodes presque forcés, respirant un air infesté de métaphores maladroitement élaborées et consentantes, nous avons décidé de laisser pour d' autres yeux ce que les nôtres refusaient de continuer à subir.
Ade (Antonia Fotaras) est une fille apparemment normale qui travaille comme sage-femme et accusée de sorcellerie pour avoir provoqué l'étouffement d'un bébé dans l'utérus. Condamnée à mort par toute une communauté qui lui tourne le dos, elle court se réfugier au sein d'un mystérieux groupe de femmes située à l'orée de la forêt et dont sa mère faisait partie. Ade découvrira toutes les réponses aux questions qui lui ont été épargnées. Son avenir réserve des surprises, elle ne le sait pas et nous ne le saurons pas non plus.
Pietro (Giorgio Belli) sera son grand amour, un jeune étudiant en médecine, fils des "Benandanti", chasseurs de sorcières. La science et la magie entreront en collision ou s'uniront pour l'éternité.
Basée sur le premier livre de la trilogie homonyme écrite par Tiziana Triana, la série vise à donner la parole au grand nombre de femmes qui ont été emmenées au bûcher en Italie au XVIIe siècle et dont les traces se sont perdues. Pleins de bonnes intentions, nous nous prédisposons positivement à recevoir une œuvre tout en nous méfiant fortement.
D'abord à cause de ses origines. L'Italie n'est pas exactement renommée pour la production de séries. En conséquence, ce manque bien connu devient évident des le début. Sachons que l'expérience d'un seul degré sépare l'ébullition de l'évaporation et malheureusement Luna Nera nous exaspère avec la gazification des concèptes.
Ce qui s'en suit est que Luna Nera a un sérieux problème de script. L'évidence d'un manque de transition entre les scènes nous gifle violemment. Cette erreur acquiert, d'après nous, une ampleur impardonnable étant celle-ci raison suffisante pour abandonner son suivi. Les relations établies entre les personnages sont ridicules. Dans le cas d'Ada et de Persépolis leur haine dans une scène se transforme en un amour fraternel dans la suivante sans raison apparente ni compréhensible pour le spectateur.
Ada et Pietro se saluent et 3 scènes plus tard se promettent l'amour éternel. Le déséquilibre énorme est dû a un manque de transition ou de communication du passage du temps soit en raison d'une faute dans le script, soit en raison de coupures lors de la post-production. La promesse d'une psychologie profondément enracinée, véridique et fondée sur des bases crédibles s'est révélée comme une hallucination de LSD.
Naturellement, si les tempos ne sont pas compréhensibles, le global acquiert une couleur de théâtre plutôt que de série. Si cette section est appelée «critique de série», c'est parce que nous critiquons la série et non pas le film, la pièce, le livre ou la bande dessinée. Luna Nera penche vers la représentation de l'art scénique dans un plateau de télévision.
Les 16 semaines dédiées au tournage n'ont pas suffi à peaufiner les performances. Un ensemble de fausses gesticulations et la pauvreté des chorégraphies des batailles livrées dénotent une insuffisance cardiaque chronique. Flegmatique dans sa linéarité, Luna Nera n'apporte pas la débauche qu'annonçaient ses, soit disant, différents niveaux de lecture.
Ce qui devait en principe être une justification féministe, un hymne à la liberté et à la diversité des femmes et une ode à leurs superpuissances réelles et métaphoriques perd toute son énergie dans l'explication du message. On ne peut transmettre la force de ces femmes discriminées avec des dialogues bourrés de paille et un regard vide.
La symptomatologie est claire, Luna Negra souffre du syndrome de dysfonctionnement multiviscéral. À plusieurs niveaux, plusieurs échecs. Sans aucun doute c'est l'un des inconvénients d'avoir autant de niveaux de lecture.
